Adresse fiscale du médecin libéral : définition, impacts et choix stratégiques

06/06/2025
Pascal Lamperti

Lorsqu’on débute une activité en médecine libérale — en tant que remplaçant, installé, collaborateur, associé de société —, on découvre l’importance de l’adresse fiscale.

Obligatoire dans tous les formulaires d’enregistrement, d’inscription et d’affiliation (URSSAF, CARMF, CPAM, services des impôts, assureurs professionnels, etc.), elle peut être source de confusion : est-ce votre domicile ? votre cabinet ? plusieurs cabinets différents pour l’exercice multi-sites ? un local partagé ?

Voici un guide complet pour comprendre à quoi elle correspond, comment la choisir lorsque c’est possible, quels sont ses impacts sur votre activité médicale, sur votre vie privée par son divulgation publique ou non, et sur le montant des impôts professionnels et locaux à payer in fine.

Qu’est-ce que l’adresse fiscale d’un médecin libéral ?

L'adresse fiscale est l’adresse physique officielle de rattachement de votre activité libérale.

Pourquoi c'est important ? Elle constitue un élément obligatoire d’identification de votre activité professionnelle, que ce soit lors de sa création initiale, de toutes les modifications de situation qui interviendront lors de votre cursus, et enfin lors de la cessation définitive d’activité. 

Elle détermine :

  • Le lieu d’imposition de vos revenus professionnels (BNC, EI/IS, SEL, etc.)
  • Et donc votre centre des impôts (SIE = Service des Impôts des Entreprises) compétent
  • Le ou les lieux d’imposition à la CET, cotisation économique territoriale constituée de la CFE (cotisation foncière des entreprises) et de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée)
  • Le lieu de rattachement à l’INPI (guichet unique des formalités), à l’URSSAF, à la CARMF et à la CPAM (pour le seul versant cotisations liées à votre activité professionnelle et non le versant privé des prestations)
  • La réception de tous courriers administratifs et fiscaux liés à votre activité professionnelle
  • Le lieu de rattachement au fichier RPPS (répertorie partagé des professionnels de santé) et au fichier de votre Ordre des médecins
  • Le lieu de déclaration d’un potentiel accident de travail ou de trajet, voire du risque d’exposition professionnel au sang contaminé
  • Le lieu de réquisition judiciaire éventuelle pour la PDS (permanence des soins)
  • Le lieu de rattachement au tribunal judiciaire en cas de plainte d’un patient ou d’un tiers liée à votre activité professionnelle

À ne pas confondre avec :

  • Votre adresse personnelle : qui peut être identique si vous exercez uniquement sous le statut d’étudiant ou médecin remplaçant, Dr Junior remplaçant, ou si votre cabinet d’installé libéral est situé dans le même lieu que votre habitation
  • L’adresse fiscale des médecins que vous remplacez si vous exercez uniquement sous le statut d’étudiant ou médecin remplaçant ou de Dr Junior remplaçant
  • Votre lieu ou vos lieux d’exercice réels : le ou les lieux où vous consultez, notamment en cas d’exercice multi-sites
  • L’adresse du siège des structures juridico-fiscales auxquelles vous êtes liés par votre exercice professionnel (SCM, SCP, SEP, SDF, SEL, SISA, MSP, etc.) : souvent distincte de votre adresse fiscale.

Peut-on choisir son adresse fiscale ?

Le choix dépend de votre statut d’exercice :

Médecin remplaçant (ou étudiant, interne, Dr Junior)

  • Adresse fiscale = domicile personnel
  • Vous ne disposez pas de cabinet attitré : vous exercez dans ceux des autres

A savoir : si vous êtes médecin remplaçant thésé, docteur en médecine et inscrit donc obligatoirement à un Ordre départemental des médecins et vous n’avez aucune activité salariée concomitante : votre adresse fiscale est celle de votre domicile, mais attention, votre domicile doit être situé dans le même département que celui de votre inscription à l’Ordre des médecins. Dans le cas contraire, nous contacter pour un conseil stratégique spécialisé.

Médecin exclusivement adjoint temporaire d’un titulaire

  • Adresse fiscale = domicile personnel

Médecin exclusivement associé temporaire d’un titulaire

  • Adresse fiscale = adresse fiscale du titulaire auquel vous êtes associé

Médecin installé hors collaborateur (individuel ou en cabinet de groupe)

  • Adresse fiscale = adresse du cabinet ou de votre cabinet principal en cas d’exercice multi-sites

Médecin installé collaborateur (individuel ou en cabinet de groupe)

  • Adresse fiscale = adresse du cabinet de votre confrère titulaire avec lequel vous êtes lié par le contrat de collaboration libérale
  • Si plusieurs contrats de collaborations libérales, votre adresse fiscale est celle du lieu dans lequel votre activité libérale est prépondérante
  • Si vous effectuez par ailleurs des remplacements libéraux sous le statut de collaborateur libéral, votre adresse fiscale est celle de votre lieu de collaboration libérale et jamais celle de votre domicile

SCM, SCP, SEP, SDF, SEL, SISA, MSP

  • Adresse fiscale = celle de la structure d’exercice telle qu’enregistrée auprès de votre Ordre départemental des médecins et du fichier RPPS

Peut-on avoir une adresse fiscale différente de son lieu d’exercice ?

Oui, uniquement dans quelques rares cas très particuliers :

  • Activité libérale exercée à l’étranger, et notamment en Europe, mais avec souhait/besoin de resté rattaché à une inscription ordinale française
  • Activité libérale exclusive de PDS (permanence des soins) ou de régulation de PDS choisie dans le régime libéral
  • Activité libérale itinérante de remplaçant à partir d’un domicile située hors de France
  • Autres : nous consulter

Ne négligez pas votre adresse fiscale : voici pourquoi

Pour l’imposition de vos revenus professionnels

  • Elle détermine votre SIE (service des impôts des entreprises) à ne pas confondre avec votre SIP (service des impôts des particuliers) appelé couramment encore Centre des finances publiques
  • Elle influence votre éligibilité aux dispositifs d’exonérations fiscales de revenus ou d’imposition à la CET (cotisations économique territoriale) :
    • Zones de revitalisation rurale (ZRR), Zones France Ruralité Revitalisation (ZFRR et ZFRR +)
    • Zones franches urbaines (ZFU), Quartier prioritaires de la ville (QPV)
    • Exonérations de CET, ville de moins de 2 000 habitants
    • BER (bassins d’emploi à redynamiser)
    • Exonérations DROM (ex DOM-TOM)
    • Zone Franche d'Activité Nouvelle, ZFANG
    • Et nombreux autres dispositifs très spécifiques

Pour le montant de votre CET/CFE (cotisation foncière des entreprises)

  • Cet impôt local, décorrelé de votre revenu professionnel, est d’un montant très variable d’une commune à l’autre, dans des proportions allant de 2 à 10 !

Pour les exonérations fiscales et/ou sociales (cotisations) liées aux zones déficitaires en offre de soins

  • PDS, permanence des soins
  • Régulation téléphonique de PDS
  • Zones de montagne et exonérations partielles de cotisations sociales

Pour les aides de tous types, dont celles à l’installation

  • Toutes les aides ARS (agences régionales de santé) ou départementales (conseil départemental) ou locales sont directement dépendantes de l’adresse fiscale
  • Exemple : une aide à l’installation en zone sous-dense ou en désert médical

Pour la réception des documents officiels

  • Vous recevez l’ensemble des correspondances administratives (relances, justificatifs, échéanciers, convocation, réquisition…) à cette adresse

Comment déclarer ou modifier son adresse fiscale ?

Un seul guichet unifié et dématérialisé est compétent : INPI Ce guichet centralise depuis le 01/01/2023 toutes les formalités obligatoires concernant votre cursus professionnel, de la création à la cessation d’activité en passant par toutes les modifications de situations. Il est le seul qui soit opposable à toutes les administrations ou institutions dont vous relevez.

A savoir : selon la démarche ou formalité obligatoire vous concernant, il est absolument prudent d’en vérifier le bon enregistrement et la bonne transmission à l’administration ou l’institution concernée.

À retenir

  • L’adresse fiscale n’est pas un détail administratif : elle structure votre vie libérale
  • Elle peut ouvrir ou fermer des droits (exonérations, aides…)
  • Elle doit être mise à jour systématiquement en cas de changement
  • Le choix entre domicile ou cabinet dépend de votre statut (remplaçant, installé, structure…)